Nouveau droit comptable – allégements pour les PME?

Selon des estimations, finalement plus de 95% des entreprises en Suisse remplissent les critères du contrôle restreint et sont ainsi soumises aux normes de base du nouveau droit comptable. C’est la raison pour laquelle il convient d’examiner comment évolueront les exigences en matière de présentation des comptes pour la grande majorité des entreprises Suisses, qui peuvent être considérées dans la plupart des cas également comme PME.

Les entreprises individuelles et les sociétés de personnes dont le chiffre d’affaires est inférieur à
CHF 500 000
sont soumises aux nouvelles exigences en matière de comptabilité, mais peuvent ignorer les prescriptions relatives à la présentation des comptes. Les associations et les fondations, qui n’ont pas l’obligation de requérir leur inscription au registre du commerce, ainsi que les fondations dispensées de l’obligation de désigner un organe de révision peuvent se prévaloir de ces allégements supposés (art. 957 COrév). Le législateur retient que les entreprises concernées peuvent se contenter à cet égard d’une comptabilité des recettes et des dépenses ainsi que du patrimoine. En d’autres termes, il s’agit d’une comptabilité «simple» communément appelée le «carnet du lait», comme la désigne le "Message" relatif à la révision du Code des obligations. Comme avantages et faiblesses d’une comptabilité selon et au sens de l’article 957, al. 2 COrév peuvent être soulevés :

Avantages

Comptabilité d’abord plutôt succincte:

  • livre de caisse, comptes postaux et bancaires, avec justificatifs à l’appui 
  • récapitulatif du patrimoine

(La loi fédérale sur les impôts directs autorise la méthode déjà actuellement pour les PME qui n’ont pas l’obligation de tenir une comptabilité)

Faiblesses

  • Les paiements de clients et les paiements aux fournisseurs doivent être répertoriés séparément
  • Détermination du montant des amortissements
  • Evaluation des stocks
  • Par défaut de systématique, le risque d’erreur est important
  • La fiabilité vis-à-vis des autorités fiscales
  • La marge de manoeuvre en matière de constitution et de dissolution de réserves latentes est en grande partie supprimée
  • Pas de gain de temps ni d’efficacité
  • Ne constitue pas un instrument de gestion

 


Dans ce contexte, la notion de PME n’est réellement pas adéquate pour toutes les entreprises dont le chiffre d’affaires est supérieur à CHF 500 000 mais qui n’atteignent pas les valeurs seuils 20/40/250. En effet, cette délimitation englobe vers le haut également des entreprises d’une taille considérable. Pour ces dernières, les changements seront avant tout d’ordre formel alors que, sur le plan matériel et de transparence, pratiquement rien n’a changé, étant donné que les réserves latentes arbitraires ne sont pas bannies de la présentation des comptes pour des raisons liées au principe déterminant pour le droit fiscal (1).

Bases et principes de la présentation des comptes : On peut déplorer que la clause générale de l’article 958, al. 1, COrév, qui prévoit que les comptes doivent présenter la situation économique de l’entreprise de façon qu’un tiers puisse s’en faire une opinion fondée, demeure en réalité sans grande portée (2). En effet, elle peut être contournée par le biais de la marge de manœuvre qui subsiste en matière de réserves latentes arbitraires. Le rapport de gestion doit être soumis dans les six mois qui suivent la fin de l’exercice à l’organe ou aux personnes qui ont la compétence de l’approuver (art. 958, al. 3, COrév). Dorénavant, toutes les entreprises soumises à l’obligation de tenir une comptabilité devront également vérifier elles-mêmes leur capacité à poursuivre l’exploitation. En l’occurrence, il s’agit d’évaluer la possibilité de la continuation de l’exploitation dans les douze mois qui suivent la date du bilan (art. 958 a, al. 2, COrév), ce que prévoit une disposition des IFRS (3). Lorsque la poursuite de l’activité n’est pas envisageable, les comptes doivent être établis sur la base des valeurs de liquidation et également des provisions doivent être constituées pour couvrir les charges liées à la cessation d’activité. La cessation de l’exploitation et la situation patrimoniale doivent être commentées dans l’annexe. Les entreprises soumises à l’obligation de tenir une comptabilité doivent procéder à la délimitation périodique et au rattachement des charges et des produits si les produits nets des ventes des biens et des prestations de services ou les produits financiers dépassent CHF 100’000 (art. 958 b, al. 2, COrév). L’article 958 c COrév énumère les principes régissant l’établissement régulier des comptes. Le principe de «prudence» est judicieux, malgré la possibilité de pouvoir créer des réserves latentes: il vise à empêcher toute surévaluation des actifs et sous-évaluation des passifs. En cas de doute, on choisira la moins favorable des deux évaluations potentielles. Mais comme les réserves latentes arbitraires nuisent à la continuité, le principe selon lequel la présentation et l’évaluation se font toujours selon les mêmes bases reste lettre morte (4). L’exigence d’adapter la présentation des comptes aux particularités de l’entreprise et de la branche est également formulée (art. 958 c, al. 3, COrév). Ainsi, un laboratoire, par exemple, dont les brevets constituent les seules immobilisations incorporelles qu’il détient devrait intituler le poste du bilan «brevets» et non «immobilisations incorporelles».

Théoriquement, l’actif est défini de manière irréprochable : il comprend les éléments du patrimoine dont l’entreprise peut disposer en raison d’événements passés, dont elle attend un flux d’avantages économiques et dont la valeur peut être estimée avec un degré de fiabilité suffisant (art. 959, al. 2, COrév). Cette définition permet aussi d’inscrire au bilan des actifs élaborés par l’entreprise elle-même pour autant qu’ils remplissent les critères prescrits. Le principe de traçabilité des enregistrements comptables (cf. art. 957 a, al. 2, ch. 5, COrév) devrait suffire ici à empêcher que des dépenses qui ne constituent pas des actifs transférables ou réalisables soient inscrites au bilan. Les dettes doivent être clairement décrites (art. 959, al. 5, COrév) et sont à comptabiliser à leur valeur nominale (art. 960 e, al. 1, COrév). L’évaluation des provisions est également réglée (art. 960 e, al. 2, CO). Toutefois, étant donné que les provisions servent par exemple à «assurer la prospérité de l’entreprise à long terme» ou peuvent être constituées en prévision de mesures de «remise en état d’immobilisations corporelles» et qu’en outre, les provisions qui ne se justifient plus ne doivent pas obligatoirement être dissoutes (art. 960 e, al. 3 et 4, COrév), la constitution et la dissolution de réserves latentes est possible sans autres formalités. La nécessité d’indiquer les valeurs de l’exercice précédent (art. 958d, al. 2, COrév) s’applique désormais à toutes les entreprises soumises à l’obligation de tenir une comptabilité et non plus aux seules sociétés anonymes.

Monnaie et langue : Alors que la comptabilité peut être tenue dans la monnaie fonctionnelle au lieu de la monnaie nationale, une conversion dans la monnaie nationale est prescrite pour la présentation des comptes. Les cours de conversion doivent être mentionnés et éventuellement commentés (cf. art. 958 d, al. 3 et 4). Le fait de ne pas renvoyer en l’espèce à des méthodes de conversion reconnues constitue une certaine lacune (5).


Saisie des actifs : «L’actif comprend les éléments du patrimoine dont l’entreprise peut disposer en raison d’événements passés, dont elle attend un flux d’avantages économiques et dont la valeur peut être estimée avec un degré de fiabilité suffisant. Aucun autre élément du patrimoine ne peut être porté au bilan.» (6). Ainsi, l’entreprise peut désormais inscrire les actifs au bilan plus rapidement que ce n’était le cas jusqu’à présent, puisqu'il suffit qu’il soit «vraisemblable» que ces moyens affluent. En revanche, sous le régime des IFRS, par exemple, les indemnités d’assurance pour préjudices ne peuvent être inscrites au bilan que si l’entité a la quasi-certitude de recevoir ce remboursement (7); les immobilisations incorporelles élaborées par l’entreprise elle-même ne peuvent être inscrites au bilan que si elles satisfont six critères d’activation (8).

Structure minimale : Le bilan et le compte de résultat doivent être présentés sous forme de tableau ou de liste (art. 958d, al. 1, COrév). Désormais, indépendamment de la forme juridique, une structure minimale est exigée pour le bilan et le compte de résultat, qui est en adéquation avec le cadre comptable des PME et cohérente au regard de la Swiss GAAP RPC 3 (9). Les entreprises présentant un fort degré d’immobilisations n’ont cependant toujours pas le droit de faire figurer leur actif immobilisé ou leurs capitaux propres avant l’actif circulant ou les capitaux étrangers. Par souci d’harmonisation avec les RPC, les liquidités et les titres, de même que les provisions à court terme doivent être présentés séparément des autres dettes à court terme. Le fait que, selon le COrév, les pertes cumulées et les parts de capital détenues doivent désormais aussi figurer en tant que postes négatifs dans les capitaux propres doit être salué car c’est seulement ainsi qu’un surendettement peut être mis en évidence. Bien que les parts de capital détenues soient désormais portées en déduction des capitaux propres, les dispositions applicables à la constitution et à la dissolution de la réserve pour actions propres (art. 659 a, al. 2 et art. 671 a CO) sont restées inchangées. Il s’agit toutefois d’une erreur et la pratique montrera ce qu’il en est réellement. L’application isolée de la nouvelle réglementation serait en fait préférable, car les dispositions relatives à la structure du bilan ne prévoient pas de réserve pour actions propres (toutefois, elles n’en prévoient pas non plus en cas de réévaluation d’immeubles ou de participations afin d’éliminer un bilan déficitaire aux termes de l’art. 670 CO).

Le compte de résultat est lui aussi compatible avec le plan comptable des PME (10). En revanche, la présentation du résultat opérationnel (EBIT) et des autres produits d’exploitation manque dans l’optique de l’art 959b COrév. La marge de manœuvre en matière de postes extraordinaires et hors exploitation pourrait être utilisée afin de bannir des éléments inopportuns de la comptabilité régulière, ces postes n’étant pas définis, contrairement aux Swiss GAAP RPC (11). Le compte de résultat peut être présenté sous forme de compte de résultat par nature, comme cela est l’usage pour les PME, mais aussi en tant que compte de résultat par fonction (ou sur vente). Dans ce dernier cas, les postes Charges de personnel, Amortissements et Corrections de valeur devront figurer dans l’annexe (art. 959 b, al. 4, COrév).

Pour les PME, l’obligation de présenter dans l’annexe les événements importants survenus après la date de clôture du bilan est entièrement nouvelle (art. 959 c, al. 2, ch. 13, COrév). Le savoir-faire nécessaire devra être acquis dans cette perspective afin de pouvoir, à l’avenir, distinguer les événements qui doivent encore figurer dans les comptes, de ceux qui doivent être uniquement mentionnés dans l’annexe et des autres qui ne doivent absolument pas être pris en compte. Les dispositions claires des Swiss GAAP RPC pourraient se révéler une aide précieuse à cet égard (12). Car ne l’oublions pas, la structure minimale obligatoire peut représenter un grand défi pour certaines PME.

Évaluation : Les actifs et les dettes sont parfaitement définis. Certes, le principe du coût d’acquisition est nouvellement ancré dans la législation (art. 960 a, al. 1, COrév), mais se voit relativisé par la possibilité de constituer des réserves latentes. En ce qui concerne les actifs, de telles réserves peuvent être constituées «à des fins de remplacement», et «pour assurer la prospérité de l’entreprise à long terme» (art. 960 a, al. 4, COrév) et, concernant les provisions, également «pour assurer la prospérité de l’entreprise à long terme» de même que pour la «remise en état des immobilisations corporelles» (art. 960 e COrév). Les PME n’ont aucune raison de craindre de voir leur latitude en matière d’évaluation limitée. La raison en est due au fait que les comptes annuels dressés selon les principes du droit commercial sont incontestablement déterminants sur le plan fiscal. L’introduction du principe de l’évaluation individuelle mérite d’être saluée, dans la mesure où le regroupement n’est pas usuel pour le poste (art. 960, al. 1, COrév), ainsi d’ailleurs que le maintien du principe selon lequel, en présence d’indices concrets de surévaluation des actifs ou d’insuffisance de provisions, les valeurs doivent être vérifiées et, le cas échéant, adaptées (art. 960, al. 3, COrév).


Pour l’évaluation subséquente des actifs, il est possible de recourir à des prix observables sur un marché activ et ce, avec ou sans réserve de fluctuation (art. 960 b COrév). Il s’agit là d’une véritable innovation pour les PME mais sans aucune précision de la part du législateur. Cette situation résulte du fait que le Parlement – à l’encontre du "Message" qui, lui, entendait à restreindre l’évaluation à la valeur actuelle aux actifs cotés à la bourse – a décidé seul de cette opportunité de pouvoir utiliser également "des valeurs de marché à déterminer" (13). La norme IFRS 13 expose sur 160 pages comment déterminer des prix observables sur le marché sans se référer à des cours de Bourse. Elle retient notamment dans l’annexe A la définition suivante:

«La juste valeur (fair value) est le prix qui serait obtenu dans le cadre d’une opération commerciale régulière (normale) parmi les participants du marché, le jour de référence pour l’évaluation, lors de la vente d’un actif donné …». «Sur un marché activ, des transactions sont réalisées sur l’actif ou l’engagement en question avec suffisamment de fréquence et de volume afin d’assurer la mise à disposition permanente d’informations sur les prix».

Les Swiss GAAP RPC prescrivent dans quel cas l’évaluation à la juste valeur est possible, soit :

  • les titres de l’actif circulant (impérativement)
  • les immeubles détenus uniquement à des fins de rendement (option)
  • les titres présentés dans les immobilisations financières (nouvelle option)
  • les dérivés utilisés sans fin de couverture (impérativement)
  • les dérivés utilisés à des fins de couverture (nouvelle option)
  • au cas du test de dépréciation respectivement «impairment» (impérativement)

- et explicitent ce que la notion recouvre (14). La juste valeur peut être un prix du jour (prix qui devrait normalement être payé dans la marche normale des affaires), une valeur de marché nette (prix de vente fixé entre partenaires indépendants, moins les coûts de mise à disposition), une valeur utile (valeur escomptée des entrées et sorties futures de fonds à attendre), ou encore une valeur de Liquidation. Dans le COrév, le législateur autorise le recours à de telles valeurs de marché sans autres restrictions. Là aussi, la pratique montrera de quelle façon ces exigences sont ou peuvent être mises en œuvre. Dans le sillage des nouvelles dispositions comptables, rien ne s’oppose à l’évaluation des immeubles à la valeur vénale, s’il s’agit d’un prix de marché observable dans un marché activ. La question est toutefois de savoir quelle méthode d’évaluation choisir: la méthode DCF (Discounted Cash-Flow) (cf. exemple ci-après) ou bien également la méthode de la valeur comparative (15).

 

Évaluation des immeubles, méthode DCF (discounted cash-flow)

Données
- Les cash-flows nets des années 1 à 7 correspondent aux estimations effectives des produits nets des loyers
- Estimation de la valeur du marché de l'année 8, qui est escomptée
- Le taux d'escompte correspond au rendement sans risque des obligations de la Confédération, augmenté d'une prime de risque

(il s'agit d'un immeuble de rendement très bien situé)

Taux d'escompte 3,5% (Obligations de Confédération 0,72%)     Années   
 1  2  3  4  5  6  7  8
Cash-flows
(année 8 = valeur de marché)
17 13 19 18 15 -1 14 320
Valeurs actualisées 16.4 12.1 17.1 15.7 12.6 -0.8 11.0 243.0
Valeur DCF totale  327.2        

 

Avec la méthode DCF, le taux d’escompte, les cash-flows estimés et la valeur finale laissent une large place à l’appréciation. La méthode de la valeur comparative est presque exclusivement utilisée pour l’estimation de terrains. Les majorations et décotes par rapport aux prix au m2 recensés sont quelque peu arbitraires, un inconvénient qui ne peut cependant pas être entièrement supprimé. C’est pourquoi il faudrait déconseiller aux PME de s’avancer sur ce terrain miné.

Si l’on opte pour des prix observables sur le marché, il s’agira de veiller au principe de continuité, tout en procédant aux actualisations nécessaires. Parce qu’il y a tant d’impondérables inhérents à l’évaluation des immeubles, il faudrait en fait s’assurer les services d’un expert, ce qui occasionnerait évidemment des coûts supplémentaires. Quoi qu’il en soit, l’obstacle principal en la matière demeure le caractère déterminant que revêt la comptabilité commerciale. En matière d’impôt direct, de telles évaluations au-delà de la valeur d’acquisition sont imposables en vertu du principe de sincérité du bilan et viennent s’ajouter au résultat imposable.

L’admissibilité de réserves de fluctuation jusqu’à la valeur d’acquisition initiale représente un autre élément critique (16). Lorsque la valeur d’acquisition et la valeur de marché d’immeubles anciens très bien situés divergent de manière importante, l’écart peut dépasser d’un multiple la valeur d’acquisition. Les réserves de fluctuation vont ainsi à l’encontre du principe de l’évaluation à la valeur actuelle.


Premier niveau, chapitre III du titre 32e du COrév : Si une grande entreprise, appartenant à un groupe, renonce à des indications supplémentaires dans l’annexe, les actionnaires minoritaires (actionnaires qui, ensemble, détiennent une participation d’au moins 10% du capital-actions, 10% des membres de la société coopérative ou 20% des membres de l’association) peuvent exiger des comptes établis comme pour les entreprises d’une certaine importance (art. 961 d, al. 2, COrév). La loi mentionne en outre les associés et les membres qui répondent personnellement des dettes de l’entreprise ou sont soumis à l’obligation de faire des versements supplémentaires. Cette dernière éventualité peut se rencontrer dans les sociétés coopératives et les Sàrl. Les associations peuvent quant à elles prévoir dans leurs statuts que leurs membres sont responsables individuellement.

Deuxième niveau, chapitre IV du titre 32e du COrév : Les dispositions sur les intérêts minoritaires applicables à la norme reconnue concernent toutes les entreprises. Pour les comptes établis selon une norme reconnue, les valeurs seuils susmentionnées sont conservées; seule la participation des actionnaires ou associés de la Sàrl doit désormais représenter 10% au lieu de 20% au total (art. 962, al. 2,COrév). La loi mentionne en outre les associés et les membres qui répondent personnellement des dettes de l’entreprise ou sont soumis à l’obligation de faire des versements supplémentaires. Ces intérêts minoritaires ont une importance considérable: l’actionnaire minoritaire d’une entreprise familiale détenant une part de 20% du capital-actions peut ainsi exiger que les comptes soient établis conformément aux RPC fondamentales.

Troisième niveau, chapitre V du titre 32e du COrév : Seules les personnes morales peuvent être soumises à l’obligation d’établir des comptes consolidés (art. 963, al. 1, COrév). Et elles peuvent en être libérées à certaines conditions. En revanche, elles y sont néanmoins soumises si des comptes consolidés sont indispensables pour garantir une appréciation aussi fiable que possible de la situation économique ou la protection des intérêts minoritaires. Les valeurs seuils suivantes sont applicables aux comptes consolidés: des associés représentant au moins 20% du capital social, 10% des membres de la société coopérative ou 10% des membres de l’association. La loi mentionne encore les associés et les membres qui répondent personnellement des dettes de l’entreprise ou sont soumis à l’obligation de faire des versements supplémentaires, ainsi que l’autorité de surveillance de la fondation (art. 963 a, al. 2, COrév).


Aucun changement n’est intervenu pour les PME en matière de réserves latentes. En revanche, il sera dorénavant permis d’inscrire plus rapidement certains actifs au bilan, et les actifs pour lesquels il existe des prix observables sur un marché activ pourront, si on le souhaite, être évalués à leur valeur actuelle, avec les conséquences fiscales que cela entraîne. L’évaluation des actifs et des provisions doit être vérifiée en cas d’indices concluants. Désormais, les PME revêtant la forme juridique d’une entreprise individuelle ou d’une société de personnes doivent appliquer une structure minimale du bilan et du compte de résultat sous forme de tableau ou de liste dans la mesure où elles ne peuvent ni ne veulent recourir au «carnet du lait». Indépendamment de leur forme juridique, toutes les PME soumises à l’obligation de tenir une comptabilité devront, de toute façon, respecter les principes comptables dans la mesure où ils peuvent avoir une incidence sur le plan juridique, p. ex. en raison des réserves latentes. Les PME déployant leur activité principalement dans l’UE peuvent tenir leurs comptes en euros, mais avec certaines conséquences en matière de publication.

Du fait du caractère déterminant de la comptabilité commerciale pour le calcul de l’impôt, il existe toujours la possibilité de constituer et de dissoudre des réserves latentes. Il devrait être possible d’adapter la législation fiscale de façon que des comptes annuels fiscaux puissent exister à côté des comptes annuels commerciaux. C’est uniquement si l’on y parvient dans un avenir lointain que le droit de constituer des réserves latentes arbitraires pourra être supprimé. Mais d’ici-là il reste qu’une solution pour évaluer des comptes annuels de manière véritablement fiable: leur établissement volontaire selon les dispositions des RPC fondamentales.  

Le Parlement a décidé que certaines entreprises sont tenues de dresser des états financiers selon une norme reconnue (art. 962, al. 1, COrév). En parallèle, il reste nécessaire d’établir les états financiers selon les normes de base du COrév afin de pouvoir imputer dans la pratique les amortissements et provisions supplémentaires accordés par les autorités fiscales. En outre, il est en général avec relativement peu d’efforts supplémentaires possible, d'établir des comptes annuels donnant une image fidèle (true & fair view) de la situation financière de l’entreprise, en conformité avec les RPC fondamentales. De tels états financiers, constituant de la sorte également une base solide pour la gestion de l’entreprise et en plus une bonne base pour planifier par exemple la succession de l’entreprise et la levée de fonds à ce sujet. Ces états financiers établis à titre volontaire selon une norme reconnue seront toutefois soumis au contrôle ordinaire. Il faut attendre que les bailleurs de fonds ne les accepteront que s’ils sont dûment munis de l’opinion d’audit.

Des progrès ont certes été réalisés avec le nouveau droit comptable, mais en raison de manque de volonté politique le grand bond en avant  - en direction d’une image fidèle (true & fair view) - ne pouvait décidément réussir. En clair, les PME ne pourront donc pas se passer d’états financiers établis en conformité avec les RPC fondamentales.


  1. cf. Peter Böckli: Auswirkungen der neuen Rechnungslegung auf die Gewinnsteuer, in: L’Expert-comptable suisse 2011/4, p. 234–235
  2. Ont une opinion moins négative à ce sujet: Marco Passardi/Silvia Passardi-Allmendinger: Das neue Rechnungslegungsrecht – eine «neue doppelte Buchhaltung»?, in: Trex 2/12, p. 72
  3. cf. International Accounting Standards Board (2012): Official Pronouncements issued at 1st January 2012, IAS 1, Presentation of Financial Statements, paragraphes 25 et 26
  4. cf. Rapport entre principe de continuité et réserves latentes in MSA 1, 2009, p. 55, 66 et 71
  5. cf. Pfaff, Dieter/Glanz, Stephan: Das zukünftige Rechnungslegungsrecht, in: Rechnungswesen und Controlling, 2/12, p. 10
  6. Art. 959, al. 2, COrév
  7. cf. IAS 37, paragraphe 53
  8. cf. IAS 38, paragraphe 57
  9. cf. Teitler-Feinberg: Implications de la nouvelle législation comptable pour les PME, in: Trex 2/2012, p. 84
  10. cf. Sterchi, Walter, Die Auswirkungen der Rechnungslegung auf KMU. Documentation d’une présentation dans le cadre d’un séminaire de la Chambre fiduciaire du 31.10.2006, folio 6
  11. cf. Böckli Peter, Das neue OR-Rechnungslegungsrecht, in: L’Expert-comptable suisse 2010/4, p. 164
  12. cf. Swiss GAAP FER Concept-cadre R/28 et MSA (2009), p. 299
  13. cf. Zihler Florian: Das zukünftige Rechnungslegungsrecht, in: L’Expert-comptable suisse 2011/1–2, p. 44 et concernant le débat parlementaire au Conseil national du 1er juin 2011 ad art. 960 b COrév: http://www.parlament.ch/ab/frameset/d/n/4819/354701/d_n_4819_354701_354748.htm texte consulté le 15.8.2012
  14. cf. Fondation pour les recommandations relatives à la présentation des comptes, cadre conceptuel, ch. 26
  15. Pour une brève description de ces méthodes, cf. Giorgio Behr, Rechnungslegung und Bewertung von Immobiliengesellschaften, in: L’Expert comptable suisse 2001/3, p. 219–224
  16. cf. Teitler-Feinberg, Evelyn, Bescheiden und teils nicht durchdacht, in: UZ|Management, 3/2012, p. 49

 

Version deutsch


Cette publication est un extrait de l’article paru dans l’expert comptable suisse 2012/11, p. 844-852. La publication originale est en langue allemande.

Rédacteurs de cette contribution: Evelyn Teitler-Feinberg / Daniel Suter

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